Je propose aujourd'hui une petite critique de la production de Jacques et son Maître, présentée par le Théâtre du Trident, au CNA, hier soir.
La troupe de la ville de Québec a bien amusé son public ottavien avec cette réécriture que Milan Kundera a fait du roman comique de Denis Diderot. Pour avoir moi-même lu (et grandement apprécié), Jacques le Fataliste, j'étais bien curieuse de savoir comment on pouvait représenter sur scène un roman aussi complexe qui repose bien plus sur la forme (jeux de narration et de dédoublement des récits) que sur l'histoire.
Eh bien, Kundera a réussi à garder l'essentiel de la pièce (l'aventure du Maître avec Agathe, les amours de Jacques, la vengeance de Mme de la Pommeraye, le meurtre du Chevalier de Saint-Ouen) et à écarter le secondaire (comme la mort du capitaine de Jacques ou encore l'histoire du porte-balle).
Le dramaturge en profite même pour faire un hommage à Diderot (qu'il nomme le "premier maître" de Jacques et de son Maître) et se moque de lui-même, pauvre" ré-écriveur", tout au long de la pièce, grâce à des adresses au public et à des jeux méta-théâtraux.
La mise en scène, quant à elle, est tout simplement géniale, et, comme le roman reposait sur la narration, c'est bien sur la mise en scène que repose la pièce. L'utilisation des marionnettes géantes (et souvent bien ridicules) pour illustrer les souvenirs, les anecdotes ou les fantasmes des personnages, donne un ton ludique, comique et même grivois à la pièce. Comment ne pas rire de l'Aubergiste (mon personnage préféré) à l'immense poitrine et au derrière assorti, ou encore de Justine aux cuisses géantes? ("Les jambes en l'air comme une femme lubrique" disait Baudelaire)
Et les personnages...et les costumes...et la musique (qui va du jazz manouche à la flute traversière et qui est jouée sur scène)...Tout est délicieux dans cette production. Rien n'est trop lourd ni trop compliqué. Tout est bien léger et termine sur cette petite note philosophique que Kundera a bien voulut rajouter. Est-ce que l'on sait où l'on va? Et devant c'est où? C'est bien n'importe où!
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